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Dossier/ Pérennisation et extension du programme des cantines scolaires : une nouvelle approche en cours d’expérimentation dans 10 écoles du Togo

Dans sa politique d’améliorer l’état nutritionnel  des écoliers  des zones pauvres et vulnérables, et d’agir sur les indicateurs scolaires en améliorant les taux des inscriptions et en réduisant ceux des abandons, l’Etat togolais, avec l’appui de la Banque Mondiale met en place des projets qui se succèdent depuis 2008.

Entre 2008 et 2017, le nombre d’écoles bénéficiaires de repas scolaires a évolué de 92 à 304, avec environ 50 576 120 (cinquante millions cinq soixante-seize mille cent vingt) de repas servis durant cette période.

Au cours de l’année scolaire  2016-2017, le Projet de Développement Communautaire et des Filets Sociaux (PDCplus), porté par le ministère du développement à a base, de l’artisanat, de la jeunesse et de l’emploi des jeunes, a été la plus grande expérience en matière  d’alimentation scolaire.  En effet, ce projet a permis de toucher 89 931 (quatre-vingt-neuf mille neuf cent trente-un) élèves dans 304 écoles primaires réparties sur l’ensemble  du territoire national, soit 38,02% des effectifs des écoles primaires publiques des cantons  les pauvres, et 6% de l’ensemble des  écoles publiques du pays.

A la suite du PDCplus, à partir de janvier 2018, l’Etat togolais  met en œuvre  le projet de Filets Sociaux et Services de Base (FSB), toujours porté par le ministère chargé du développement à la base. Ce projet qui intègre une sous-composante dédiée à l’alimentation scolaire, est confié à l’Agence Nationale d’Appui au Développement à la Base (ANADEB), bras opérationnel du ministère susmentionné.

Dénommée ‘’ Cantine scolaire’’, cette sous-composante a pour objectif d’accroître l’accès des enfants des communautés les plus pauvres du Togo à des repas scolaires réguliers, ce qui devrait, en retour, améliorer la fréquentation et la rétention dans les écoles des zones ciblées.

Au total 305 écoles primaires publiques sont couvertes, dont 143 sur financement de l’Etat togolais ; 161 sur financement de la Banque Mondiale ; et une école sur financement de la société civile issue de la diaspora africaine.

Une approche innovante  pour pérenniser les cantines scolaires

En vue d’étendre et de pérenniser la fourniture de repas  scolaires,  l’ANADEB  expérimente depuis janvier 2019, dans  dix (10) écoles dont deux (02) dans chaque  région, une nouvelle approche fondée sur la contribution  des communautés bénéficiaires  pour la préparation des mets.

« La nouvelle approche que l’ANADEB est en train d’expérimenter dans les 10 écoles,  porte sur la contribution. Avec l’ancienne pratique, c’est-à-dire ce que nous faisions avec les partenaires, il n’y avait pas de contribution.  Tout relève de de l’Etat et du partenaire, la Banque Mondiale. Mais on sent que cela ne peut pas durer. Donc avec la nouvelle approche, il est question d’amener les communautés à contribuer, à participer au repas de leurs enfants. Nous avons des pratiques diverses : dans certaines communautés,  la participation est financière. Dans d’autres,  c’est une contribution  en produits locaux  (maïs, haricot, riz etc.).  Cela se fait après analyse des besoins  pour  la préparation du repas.  On fixe ainsi une certaine mesure pour chaque produit et les parents se chargent de les apporter.  Ces produits sont stockés en magasin. En plus, les parents apportent une petite contribution financière pour l’achat des plats et des gobelets », explique  Mme Mazalo Katanga, directrice générale de l’ANADEB.  « A la fin, nous  allons tirer les leçons  et les  soumettre à l’autorité pour recevoir des instructions pour la suite », ajoute-t-elle.

Située à 8 km au sud-ouest  de Blitta-Gare, dans le canton de Doufouli  (préfecture de Blitta), l’Ecole Primaire publique d’Amalaklè  est  l’une des deux écoles pilotes de la région Centrale. Dans cet établissement, 112 élèves reçoivent trois jours dans la semaine, un repas chaud grâce à la contribution de la communauté.  « L’école d’Amalaklé présente des insuffisances  et nous avons pensé qu’à travers les cantines scolaires, on peut contribuer à améliorer les conditions de vie de la communauté. Ici,  la communauté mobilise une grande partie des vivres et nous préparons des mets locaux », explique  Essoh Fleur Sidibé, Coordonnatrice  ANADEB  pour la  région centrale. « Chaque famille a apporté deux ou trois bols de maïs ou d’haricot, et une somme de 350 F pour l’achat des plats et des gobelets »,  précise  Peleleng Assiki, chef du village d’Amalaklè.

A quelques mètres des salles de classes, un enclos servant de cuisine, où sont soigneusement rangés vivres et ustensiles,  est jalousement  gardé par  5 mamans-cantines  bénévoles, choisies dans la communauté  notamment pour leur propreté,  leur disponibilité et leurs connaissances en matière culinaire.

Pour toute l’année scolaire, l’appui  financier de l’ANADEB  à cette communauté et celle de Kazawè (dans la préfecture de Sotouboua),  abritant la deuxième école pilote de  la région Centrale, est estimée à 1.500.000FCFA. Somme nécessaire pour l’approvisionnement en produits vivriers complémentaires, qui ne sont pas cultivés dans le milieu. « Nous  fournissons à la communauté d’Amalaklè du riz,  quelques légumes et des fruits. Ces produits  n’existent pas ici »,  confie Essoh Fleur Sidibé.

Le soutien de l’ANADEB n’est pas que financier ; l’agence forme également les mamans-cantines à la préparation des  mets locaux et à une bonne pratique  d’hygiène. Le comité des parents d’élèves et les enseignants ne sont pas du reste. « Nous formons les mamans-cantines, le comité des parents d’élèves, les enseignants, bref tous les acteurs qui interviennent  dans le système », souligne la coordonnatrice ANADEB pour la région centrale.

Amalaklè n’ayant pas accès à l’eau potable, l’eau utilisée à la cantine est déparasitée au chlore grâce à l’ANADEB.

Le total cumulé des effectifs des deux écoles pilotes dans la région Centrale est de 212 élèves.

Dans la région maritime, c’est  l’EPP Gboto-Klohomé,  dans la préfecture de Yoto, et l’EPP Gapé-Avelebe dans le Zio, qui sont  retenues  pour l’expérimentation  de la nouvelle approche des cantines scolaires. A Gboto-Klohomé,   355 élèves   sont bénéficiaires.  Ici, la contribution de la communauté est essentiellement financière .Ainsi,  pour chaque repas estimé à 100 FCFA, les parents  apportent 5FCFA, l’ANADEB se chargeant du reste, c’est-à-dire 95FCFA.

Effets immédiats et point de vue des acteurs

En moins de deux mois, les effets de la nouvelle approche sont déjà visibles et salués par divers acteurs : parents d’élèves, enseignants, partenaires  techniques  et financiers.

«  Avant la cantine,  certains élèves ne trouvaient pas à manger à l’école. Après la récréation,  on ne les retrouvait  plus en classe, de même que l’après-midi. Avec la cantine, les élèves sont de plus en réguliers, on n’enregistre presque plus d’absence, ni d’abandon. Même ceux qui avaient abandonné les classes,  sont revenus.  Nous avons commencé la cantine avec 309 élèves ; une semaine  plus tard, l’effectif est monté jusqu’à 326. Aujourd’hui, ils sont environ 350.  Avec  l’arrivée de la cantine à l’EPP Gboto-Klohomé, les enfants  mangent bien et  sont contents. Pour nous les enseignants, c’est l’assurance de bons résultats en fin d’année », se  réjouit Bada Kossivi, directeur de l’EPP Gboto-Klohomé.  « Avec la cantine, tous les enfants du village en âge d’être scolarisés, nous ont rejoint et l’effectif dans les classes surtout au CP1 a explosé ! Nous remercions le gouvernement à travers  l’ANADEB, pour cette initiative », renchérit Malou Kodjo, directeur  de l’EPP Amalaklè.

Même son de cloche chez les partenaires techniques et financiers.

« Je suis impressionné par le travail qui a été  fait en si peu de temps.  Quand  la communauté s’implique, on est sûr que le programme sera durable. Souvent,  c’est quand la communauté elle-même n’est pas actrice de mise en œuvre que le programme ne met pas beaucoup de temps. Ce qui m’a impressionné, c’est le fait  que les parents s’organisent pour que les enfants mangent à l’école, les femmes  de façon volontaire s’organisent pour la cuisson des aliments. Tous ces deux éléments m’amènent à dire que c’est une très bonne initiative et je ne peux que féliciter l’ANADEB  et le ministère du développement à la base pour cette initiative. Quand les parents sont engagés, quand ils sont conscientisés, on est sûr que le programme va tenir pendant longtemps », se félicite Guy Adou, représentant du Programme Alimentaire Mondial (PAM).

« C’est une très bonne initiative… Avec cette initiative, je crois que progressivement on est en train d’entrevoir la solution pour la pérennité (des cantines scolaires, ndlr) en particulier dans un contexte où les communautés ont accepté de participer directement »,  estime pour sa part Joachim Boko, chargé de projets à la Banque Mondiale.

La nouvelle approche porte l’espoir de la pérennisation des cantines scolaires au Togo, laquelle dépend de la mobilisation des partenaires  nationaux du secteur privé et de la société civile.

(Photo : écoliers prenant le repas à l’EPP Gboto-Klohomé)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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